Ces derniers temps, on entend de plus en plus parler du devoir de réserve des agents travaillant pour l’Etat ou pour les collectivités territoriales. Mais souvent à tort et à travers, et parfois de façon bien excessive ! Alors, en quoi cela consiste-t-il exactement ? Pour le comprendre, il faut partir du principe général, fixé par l’article 6 de la loi de 13 juillet 1983, qui dispose que « la liberté d’opinion est garantie aux fonctionnaires ». Ceux-ci ne sont donc pas des sous-citoyens, ils peuvent avoir les opinions qu’ils veulent et les exprimer librement. Cependant, la jurisprudence administrative rappelle que ces libertés fondamentales peuvent néanmoins être limitées en vue de ne pas porter atteinte au service public. C’est pourquoi des règles ont été édictées en dehors et pendant les périodes électorales officielles.
En dehors des périodes électorales, les fonctionnaires sont tenus à une simple obligation de réserve. Cela signifie que dans le service, l’agent public doit s’imposer une impartialité face aux autres agents et aux usagers et qu’il doit s’abstenir de tout acte amenant à douter de sa neutralité envers son employeur. Mais en dehors du service, la liberté d’expression constitue le principe, à condition de respecter la discrétion professionnelle et la modération, non pas dans le contenu des opinions, mais dans leur mode d’expression. Le fonctionnaire doit donc simplement faire preuve de mesure dans l’expression écrite et orale de ses opinions, en s’interdisant notamment le recours aux injures et aux propos grossiers. A titre d’illustration, un like sur un post publié sur facebook ne constitue pas un manquement à cette obligation de réserve, à condition que ce post contienne des propos modérés…
Pendant les périodes électorales officielles, c’est-à-dire généralement pendant les deux semaines qui précèdent une élection, les agents sont soumis à une obligation de « réserve d’usage ». Cette tradition républicaine, qui ne découle d’aucun texte statutaire, a pour objectif de garantir la neutralité de l’administration et l’impartialité de ses agents en période électorale. Elle se traduit, notamment pour les chefs de services, par l’interdiction de participer dans le cadre de leurs fonctions à une manifestation ou à une cérémonie publique. Par contre, en dehors du service, les fonctionnaires ont comme n’importe quel citoyen le droit de participer aux élections et à la campagne qui les précède.
Voilà à quoi se limite le devoir de réserve ! Toute autre exigence de la part de chefs de services ou d’élus locaux n’a donc aucune raison d’être. Et pourtant, cela arrive assez souvent ! Dans le meilleur des cas, ce n'est que le reflet de leur ignorance crasse de la réglementation en vigueur. Mais dans le pire, c’est-à-dire lorsque la requête non fondée est délibérée, c’est ni plus ni moins qu’un abus de pouvoir caractérisé passible de sanctions judiciaires. Pour ce faire, la démarche est simple : il suffit que le fonctionnaire importuné écrive au Procureur de la République sur le fondement de l'article 40 du Code de procédure pénale qui stipule que "tout fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions acquiert la connaissance d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République"...
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