Dans un courrier daté du 17 mai, Philippe Payen, représentant de la section syndicale Force Ouvrière de l'usine Ardam/Electrolux de Revin a décidé de mettre les pieds dans le plat. Clairement et méthodiquement, il dénonce ce qu'il appelle "les arrangements odieux du couple direction d'Electrolux/intersyndicale (CFDT, CGT et CFE-CGC)" dans une lettre, que vous pouvez lire en intégralité ci-dessous, qui démontre si besoin en était l'âpreté des tensions existant au sein de l'usine-phare de Revin...
"L'intersyndicale (CFDT, CGT,
CFE/CGC) ne s'est jamais battue contre la direction d'ELECTROLUX, contrairement à nos camarades italiens qui
après 150 heures de grève, dans la même situation que nous sur la fermeture d’un
site, ont obtenu une victoire contre les délocalisations. Pire encore, le 22
octobre 2013 (1er anniversaire de l'annonce), lorsque les militants FO ont
débrayé et manifesté devant la mairie de Revin, les délégués CFDT ont remplacé
les grévistes FO à leur poste de travail (les anciens vrais syndicalistes de Martin
et Faure doivent se retourner dans leurs tombes) !! Même Poutine n'aurait jamais osé.
Aujourd'hui, nous sommes encore
400 personnes. Selni reprend 186 personnes, environ 100 départs en « préretraite
maison » sont prévus. Le reste des départs seront volontaires. Parmi les
186 personnes restants chez Selni, 66 vont fabriquer des petits moteurs de
volets roulants destinés à un client turc alors que Selni a déjà une usine en
Turquie, c'est une pure utopie. 120
personnes vont fabriquer des moteurs de machines à laver pour Electrolux. Or, on
nous apprend ce 12 mai que ce dernier est trop cher de 0,55 euros pour
Electrolux (= 20 personnes en trop pour être compétitif).
Voici, pour nous FO, notre vision
sur l'avenir. Electrolux maintient les 186 emplois de Selni sous perfusion
pendant trois à quatre ans, ensuite débranche. Selni, déjà en mauvaise santé,
dépose le bilan, puis est placé en liquidation judiciaire. La conséquence
serait pour nous un licenciement avec prime légale payée par le contribuable.
Electrolux est alors oublié, son image n'a pas été salie. Vous comprendrez que
nous FO, nous appelons ces 186 personnes : les cocus d'ELECTROLUX.
En ce moment, l'intersyndical
négocie un PSE (plan de sauvegarde
de l'emploi, anciennement plan social) en
15 jours. Normalement, la négociation dure de deux à trois mois (le temps
d'expertise comptable sur le business plan entre autre). Chez Electrolux Revin,
15 jours chrono, c'est-à-dire bâclé
(ouverture des livrets 1 et 2 le 12 mai en CCE, clôture prévu le 27 mai en
CCE). Pourquoi tant de
précipitation ? Tout simplement parce qu'une élection a lieu le 3 juin
2014 avec renouvellement des délégués. FO va probablement prendre le pouvoir
syndical.
Nous pouvons vous assurer que nous
allons demander à ELECTROLUX « quelle est la cause économique du départ
d'ELECTROLUX ». Nous sommes en ordre de bataille avec l'aide de notre
avocat Maître BRUN rémunéré
individuellement par notre collectif FO, normalement pris en charge par le
comité d'entreprise. Face au danger de ce repreneur Selni, l'intersyndicale
doit se battre pour obtenir une prime de transfert et un fond de garantie.
Que deviennent nos préretraités
maison ? Pas de soucis, pour eux ! Ce plan de préretraite concerne
les personnes nées avant 1960, compris. Certaines personnes nées en 1960 ont
commencé à travailler à 20 ans, voire 27 ans, et partiront en préretraite
maison en octobre 2014. Elles auront droit à l’indemnité légale de
licenciement, qui s'élève à 1,5 mois brut de salaire par année d'ancienneté.
Mais le PSE ajoute à cela une prime de 25 000 euros. Par ailleurs, ils
bénéficieront d'une rente égale à 85 % de leur salaire jusqu'au
moment où ils atteindront l'âge légale de départ à la retraite.
Beau cadeau d'Electrolux à des
salariés proches de la retraite dont la perte d'emploi ne porte pas un
préjudice aussi important que pour un jeune qui a tout à construire ! Mais combien pour les cocus
d'Electrolux ? J'ai oublié de vous dire que 80 % des membres de
l'intersyndicale seront préretraités. Le comité de direction (dont la
directrice Madame Llovera Villy) n'est pas repris par Selni. Pas de
soucis : méga-chèque prévu pour
eux. Ils ont rempli leur contrat : ils n'ont pas sali l'image
d'Electrolux. Mais que deviennent les
cocus d'Electrolux ?
Depuis le 22 octobre 2012, la
plupart des délégués CGT et CFDT consacrent tout leur temps au travail syndical
et distribuent leurs tracts dans l'enceinte de l'entreprise à n'importe quelle
heure, enfreignant la loi. En tant que RSS, la loi m'offre 4 heures par mois
pour mon travail syndical. Un délégué a droit à 20 heures. J'ai demandé au DRH,
monsieur Giron, plus d'heures pour me consacrer à la défense des intérêts de
tous, puisque nous sommes dans une situation exceptionnelle. J'ai eu droit à un
refus catégorique.
De plus, celui-ci me rappelant la
loi que pour la distribution des tracts, c'est à la sortie de l’usine, durant
les heures d’entrée ou de sortie des salariés. Face à cette discrimination,
j'ai crié à l'injustice et claqué la porte tellement fort qu'un des gardes du
corps de madame la directrice Llovera Villy (5 gardes du corps en 2012 contre
deux seulement aujourd'hui) a posé sa main au col sur moi pour me calmer. Suite
à mon comportement, j'ai été sanctionné par une mise à pied, avec menace de
licenciement sec. Selon Maître Brun,
spécialisé dans ce genre d'affaire depuis 20 ans, cette situation est du jamais vu."