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"Le courage, c'est d'aller à l'idéal et de comprendre le réel" (Jean Jaures/discours à la jeunesse)

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mardi 10 décembre 2013

Les dessous de l'intervention française en Centrafrique...

Le gouvernement a-t-il tort d’intervenir au Centrafrique ? Non. A la différence de précédentes opérations militaires dans lesquelles la France a été hélas engagée, celle-ci s’inscrit pleinement dans le cadre du droit international puisque le conseil de sécurité de l’ONU a donné unanimement le mandat à notre pays d’appuyer la force africaine de la Misca chargée de protéger les civils et « stabiliser » le pays. La situation humanitaire désastreuse en Centrafrique plaide également pour une intervention. Pour autant, n’oublions pas que la politique étrangère est de la politique concentrée. Dès lors qu’un ou plusieurs Etats interviennent au-delà de leurs frontières, fut-ce au nom du droit international ou de l’urgence humanitaire, c’est toujours de politique qu’il s’agit. Et même de politique intérieure. La France n’y fait pas exception. L’actualité a télescopé l’intervention en Centrafrique avec le « pacte d’avenir » pour la Bretagne. Bingo ! Ce que fait Hollande à Bangui n’est pas indépendant de ce qu’il fait à Brest. Je mélange tout ? On va voir que non.

L’Etat centrafricain s’est effondré. On ne peut pas dire qu’il était bien solide. Les régimes qui s’y sont succédé ont tous vécu à l’abri de la puissance française, qui a légitimé ou empêché divers coups d’état pour garder le contrôle du gouvernement. Mais tout ceci ne fonctionne plus pour la raison que la France contrôle des gouvernements… qui ne contrôlent plus rien. L’idée que l’on pourrait se contenter d’un petit tour conclu par l’installation de personnages plus performants que ceux en place est donc une vue de l’esprit. Il faut reconstruire un Etat ce qui ne se fera pas en quelques mois. Ceci ne se fera pas surtout sans affronter les causes de sa destruction : les politiques néolibérales et leur terrible cocktail de privatisations et libre-échange. Bref le drame centrafricain n’est pas une fatalité locale mais le résultat d’une logique globale, qui affleure plus vite et violemment aux endroits les plus fragiles. Mandela que tous célèbrent désormais avait dénoncé les ravages du libre-échange sur l’Afrique. Dès lors que les barrières douanières ont été abattues, les paysans locaux ont été ruinés par les exportations de l’agro-business. L’industrie est trop fragile pour prendre le relais. Alors toute la société se défait. La Centrafrique est donc malade du modèle agricole qui vacille aujourd’hui en Bretagne. Et on ne peut aider l’Afrique tout en continuant à défendre les aides à l’exportation pour les poulets bretons comme le fait le pacte présenté par Ayrault.

C’est légitime, le gouvernement n’interviendrait pas si nos intérêts nationaux n’étaient pas en jeu. En l’espèce, il s’agit notamment de l’uranium. L’alimentation énergétique de notre pays dépend de cette ressource que notre sous-sol ne produit guère. La Centrafrique dispose du gisement de Bakuma et de frontières stratégiques avec des voisins dotés du précieux minerai. Tant que le nucléaire restera la première source de production d’électricité dans notre pays, la France devra contrôler des gouvernements qui détiennent la clé des mines africaines. Bien sûr nous pourrions faire autrement : organiser la transition énergétique pour nous passer d’uranium. Il faudrait pour cela développer les énergies renouvelables et notamment celles tirées de la mer. Cela ouvrirait pour le coup un vrai avenir à la Bretagne, région qui compte un tiers des côtes françaises. Relocalisation de l’économie et planification écologique, deux ruptures qui permettraient une autre politique en Afrique… et en Armorique.

François Delapierre, Secrétaire national du Parti de Gauche


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