Depuis 2009, année noire pour l’industrie française qui a
alors perdu 79.870 emplois, le secteur manufacturier détruit plus de postes de
salariés dans notre pays qu’il n’en crée. C’est ce que l’on appelle la
désindustrialisation qui a abouti en quatre ans à la fermeture de très
exactement 1.087 sites industriels de plus de 10 salariés. Une véritable
saignée qui s’explique en partie par les délocalisations, qui représentent 8,5 %
des emplois perdus, mais aussi et surtout par la crise économique qui a frappé
de plein fouet les pans les plus fragiles de notre industrie. Dans les
Ardennes, où le poids du secteur manufacturier est nettement supérieur à la
moyenne nationale, le phénomène a commencé plus tôt avec la perte au cours des
10 dernières années de 6.500 emplois et la fermeture de près d’une centaine
d’usines, dont les plus marquantes ont été celles de Thomé-Génot à Nouzonville,
de Lenoir et Mernier à Bogny-sur-Meuse et de Porcher à Revin.
Des drames économiques et sociaux pour les bassins d’emplois
concernés et les centaines de familles touchées, mais aussi des traumatismes
pour les villes qui étaient habituées à vivre depuis des décennies avec les
bruits de ces sites industriels et la vue de leurs panaches de fumée ! Cela a été particulièrement vrai à Revin où les Etablissements Porcher, fondés en 1887,
étaient présents dans le quartier de la Bouverie depuis le rachat en 1902 de la fonderie
Brichet-Miette. Le début d’une magnifique success-story qui vit la société
Porcher imposer ses produits sanitaires en céramique et sa robinetterie dans
les grands hôtels, les paquebots de luxe ainsi que dans les stations thermales
et qui culmina au début des années quatre-vingt avec la production dans ses 5
sites – dont celui de Revin qui employait la moitié des 2.300 salariés du
groupe - de 1.900.000 pièces en céramique, 100.000 baignoires et 2.000 tonnes
de robinetteries. Hélas, la revente en 1992 du groupe à l’américain Ideal
Standard qui décida de céder l’activité baignoire en fonte émaillée pour se
recentrer sur la céramique dont le marché entra dans une crise profonde et
durable marqua le début d’une longue agonie qui prit fin avec la fermeture
définitive du site de Revin le 22 avril 2011.
Depuis, le croisement des ouvriers lors des changements
d’équipes a cessé, les bruits des machines se sont tus et plus aucune fumée ne
s’échappe de la cheminée de l’usine. Seule reste sur place la carcasse sans vie
de ce qui fut, avec Electrolux, un des deux poumons économiques de Revin. Une
carcasse visible de loin puisque dominée par une tour en grande partie rouillée
qui fait partie du paysage depuis des lustres. Du moins était-ce le cas jusqu’à
hier, date à laquelle sa destruction a commencé comme vous pouvez le voir sur
les quelques photos ci-dessous. La disparition d’un élément hautement
symbolique du patrimoine industriel revinois, disent déjà les plus nostalgiques
alors que les plus optimistes préfèrent voire dans cette opération l’occasion
de récupérer 4 hectares
de réserves foncières qui pourront être utilisées pour réindustrialiser la
ville. Deux positions différentes derrière lesquelles se cache une
réalité inquiétante qui n'a pas échappé au PG/La Pointe : c’est assurément la fin d’une époque industrielle
glorieuse et seulement l’espoir d’un possible renouveau à une échéance qui reste encore
indéterminée…
Laurent Bouvier
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