La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un
ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des
obligations résultant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend
impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du
préavis. L’employeur supporte la charge de la preuve de la faute grave et son
imputation certaine au salarié, et la lettre de licenciement fixe les
limites du litige. En l’espèce, Madame X… a été licenciée pour faute grave dans
les termes suivants : « à plusieurs reprises vous avez dit en présence de
témoins, je cite : « ici à [nom de l’entreprise], on peut faire
des pipes». Vous avez également fait des propositions d’actes sexuels à
des personnels de [nom de l’entreprise]. De plus, les propos tenus
envers votre hiérarchie, comme quoi il suffisait de faire, je cite « une
sucette ou une pipe dans le bureau du directeur et les choses s’arrangent
», sont inacceptables de la part d’un personnel travaillant au sein d’une
institution à caractère social, où les personnels se doivent d’adopter des
attitudes et des comportements irréprochables envers les autres personnels, les
usagers et les résidents. »
Monsieur A…, responsable qualité, va dans un courrier
de « signalement de propos grossiers » adressé à sa
hiérarchie expliquer qu’il a personnellement entendu Madame X… tenir les propos
suivants : « ici à [nom de l’entreprise] on peut faire
des pipes ». Monsieur A… précise que ces propos son choquants, et qu’il
effectue ce signalement dans le seul but de protéger le personnel contre tout
éventuel risque de mise en accusation d’attouchement ou de harcèlement de la
part de Madame X… Monsieur A… réitère ses propos dans une attestation de
témoin conforme aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile. Monsieur
B, employé d’accueil et veilleur a adressé au directeur un courrier dans lequel
il informe avoir déposé, à l’encontre de Madame X…, une main courante au
commissariat : « Suite à des propos diffamatoires, des accusations
purement imaginaires et mensongères faites contre ma personne par Madame X…
concernant des attouchements sexuels. Je vous confirme Monsieur que ces propos
sont totalement mensongers et sans fondement, qui m’ont affectés profondément ».
Monsieur B… a complété son courrier par une attestation
de témoin dans laquelle il ajoute que lors de son travail à l’accueil, Madame
X… n’a cessé de lui faire « des propositions à caractère sexuel et de
parler du sexe dans les détails matin comme soir » et que ces propositions
lui sont devenues insupportables. Madame C… a également écrit à sa hiérarchie
afin de confirmer « les paroles vulgaires de Madame X… » à l’encontre
de Monsieur D… , directeur adjoint, et de Monsieur E…, directeur à savoir : «
Si je suis convoquée je leur fait une sucette ou une pipe et cela ira bien
». Madame C… ajoute que malgré son intervention elle a le jour même dit au
réceptionniste Monsieur F… « Viens je te fais une sucette ».
- le grief n’est
pas fondé sur des dénonciations anonymes mais sur des plaintes adressées à la
direction par des salariés qui s’identifient clairement
- contrairement aux
affirmations de Madame X… les courriers des trois salariés sont clairs et
circonstanciés - les témoignages directs
de ces trois salariés qui occupent des fonctions très différentes, et dont l’un
est une femme, sont concordants
- l’employeur, débiteur
d’une obligation de sécurité envers les salariés, se devait d’agir rapidement
suite aux trois plaintes réceptionnées qui témoignent d’un certain désarroi, et
d’un mal être au sein du personnel
- l’employeur établit la
matérialité du grief résultant de propositions par Madame X… d’actes
sexuels à des salariés de l’entreprise ou encore de propos déplacés à l’égard
de membres de la direction en soutenant que moyennant des faveurs sexuelles
elle échapperait à d’éventuels reproches ou sanctions.
En conséquence, elle reconnait que le licenciement pour faute grave reprochée à Madame X...est justifié.
(Cour d’appel de Metz, 26 juin 2012 n° 12/00420, 10/02344)
Eric Rocheblave, avocat spécialisé en droit du travail et de la Sécurité Sociale
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