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"Le courage, c'est d'aller à l'idéal et de comprendre le réel" (Jean Jaures/discours à la jeunesse)

"Le courage, c'est d'aller à l'idéal et de comprendre le réel" (Jean Jaures/discours à la jeunesse)

mardi 20 novembre 2012

Nous vivons une époque formidable où tout devient possible !


Il était une fois les Trente glorieuses où tout était plus simple. Deux camps et quelques dissidences ici et là. Aujourd’hui, tout devient possible. Le meilleur comme le pire. L’inouï comme l’abject. Il y aurait de quoi remplir un livre. Et ces exemples sont pleins d’enseignements pour qui est en mesure de les décrypter. Voilà des sujets de réunions publiques qui rendraient plus sexy les initiatives d’éducation populaire ! Avis aux amateurs ! Je prendrai deux éclairages parmi des milliers.

14 novembre 2012. Les manifestations anti-austérité se déclinent dans toute l’Europe à l’appel de la Confédération européenne des syndicats. Une première fort réussie. Plusieurs centaines de milliers de manifestants rien qu’en Espagne, 4ème pays de la zone euro. Des grèves générales massives au Portugal et en Espagne. Fortes manifestations en Grèce. Le PIB a chuté de plus de 20 % depuis le début 2010 et le troisième trimestre 2012 a vu une chute de 7,2 % sur un an ! Et c’est au même moment à Athènes, devant un parterre de banquiers grecs, que Charles Dallara, directeur de l’Institut de la finance internationale (IIF), groupement d’intérêt des grandes banques de la planète, basé à Washington, s’époumone contre l’austérité. Il déclare qu’il est « temps de reconnaître que l’austérité seule condamne non seulement la Grèce, mais l’intégralité de l’Europe à la probabilité d’une ère douloureuse ». Il appelle la zone euro et le FMI à rechercher des solutions « créatives » et « non conformistes ».

Bien évidemment, l’honorable Charles Dallara ne fait là qu’être le porte-parole d’une partie des banques, qui s’inquiètent des perspectives de remboursement de leurs créances en raison de l’application des dogmes de l’ordolibéralisme (variante ultra du néolibéralisme européen). Il ajoute : « Sans une stabilisation de l’économie et une reprise de la croissance, la viabilité de la dette ne sera jamais atteinte. » Ou encore « Le FMI a un programme permettant à certains pays d’avoir accès à des prêts à taux zéro. Il est limité actuellement aux pays à bas revenus. Mais, veut-on vraiment attendre que la Grèce tombe dans cette catégorie pour reconnaître que les circonstances exceptionnelles entourant le cas grec aujourd’hui justifient quelques idées non conformistes en matière de politique de prêt au FMI ? ». Il fait même appel à la Banque européenne d’investissement (BEI). L’estocade avant de conclure « Nous sommes tous Grecs… Les problèmes de la Grèce ne pourront pas être résolus sans des changements structurels dans le fonctionnement de la zone euro ». Comment lire ce discours ? Dallara craint tout simplement que le défaut de paiement de la Grèce puisse provoquer l’écroulement du château de cartes de l’ensemble de la zone euro.

Eh bien disons-le tout net : les duettistes Merkel et Hollande en restent à la potion de l’austérité sans fin. Après la potion de l’austérité en France sur le budget 2013, puis les 20 milliards d’euros de l’impropre « choc de compétitivité », le plan de François Hollande prévoit plus de 60 milliards d’euros sur le quinquennat. Sans compter les « vertiges » supplémentaires possibles. Nous voyons donc une contradiction poindre au sein de la finance internationale. Et si le mouvement social et populaire en profitait ?

Revenons en France. Après le scandaleux accord de légalisation des dépassements d’honoraires prônant la possibilité de facturer des honoraires multipliés par 2,5 mais aussi de faire payer les cotisations sociales des médecins du secteur 2 par la Sécurité sociale, voilà que les fermeture de « blocs opératoires » entraînent un mouvement ultra-libéral (« le Bloc », les « médecins pigeons » soutenus par la Fédération de l’hospitalisation privée) dépassant les syndicats néolibéraux traditionnels (CSMF et SML) avec la revendication d’une liberté totale des médecins. Comme si certains enseignants demandaient d’être affectés dans l’école de leur choix à des salaires décidés par eux-mêmes. Et la ministre d’ouvrir la discussion. On croît rêver ! Et que dire de ces internes qui ont mêlé leur mobilisation à celles des ultras de la chirurgie et de l’obstétrique !

Quels enseignements ? La méthode UMP-PS de négociation avec la CSMF et le SML n’apporte même pas la paix chez les médecins néolibéraux. Négocier avec les néolibéraux soi-disant « modérés » contre les ultra-libéraux n’est pas plus efficace que négocier, dans un autre domaine, avec des intégristes dits « modérés » contre les ultra-intégristes. En fait, il faut changer de paradigme et prendre une voie alternative. Oui, il faut affronter l’ensemble du dispositif ordolibéral en matière de santé/protection sociale (et donc pas seulement les médecins néolibéraux) en prenant position « contre les prédateurs de la santé » incluant d’abord les firmes multinationales de la pharmacie et des assurances, le privé lucratif en matière de santé et de protection sociale. Oui, il faut promouvoir une protection sociale solidaire de type nouveau.
Hasta la victoria siempre !

(Chronique d'Evariste, ReSPUBLICA n°699, 18 novembre 2012)

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