L’année commence admirablement pour les banquiers. Les
banques viennent d’augmenter leurs tarifs, au-dessus de l’inflation qu’elles
ont en horreur, mais pas au point de ne pas l’alimenter par l’inflation des
tarifs bancaires ! Par exemple celui de la carte à autorisation
systématique, utilisées par les personnes sans chéquier qui ont recours au « droit
au compte » prévu par la loi. Un « droit » qui coûtera donc de
plus en plus cher... Mais surtout, la bonne nouvelle qui a fait bondir les
cours de bourse des banques européennes cette semaine est venue de Suisse. Le
comité de Bâle vient d’annoncer qu’il abandonnait les exigences faites aux
banques d’augmenter la part de leurs fonds propres pour 2015 et les reportait à
2019. De plus, la liste des actifs admis pour constituer ces réserves a été
considérablement élargie. À côté de l’argent liquide, des liquidités déposées
auprès des banques centrales et des obligations souveraines on trouve désormais
les obligations d’entreprises, les actions et les créances hypothécaires
titrisées comme par exemple… les subprimes !
Cette réforme des « ratios prudentiels » était
pourtant la pierre angulaire de la réforme du système bancaire et financier
annoncé après la crise des subprimes puis la faillite de Lehman Brothers en
2007 et 2008. Elle était la mesure destinée à éviter les défaillances
d’établissements bancaires. Les banquiers avaient d’abord obtenu qu’on les
laisse se réformer eux-mêmes dans le cadre de ce comité de Bâle constitué de
gouverneurs de banques centrales majoritairement européennes et donc dorénavant
majoritairement « indépendantes ». Ils étaient alors prêts à toutes
les promesses pour éviter une règlementation accrue de leurs activités par la
loi. Mais dans un second temps leur lobbying est venu à bout des engagements de
ces accords dits de Bâle III qui auraient représenté pour eux un manque à gagner
dont ils ont expliqué sans rire qu’il allait faire défaut à l’économie.
Oui vous avez bien lu. Les banques qui déjà ne prêtent pas
les 1000 milliards d’euros qui leurs sont abondamment fournis (à un taux de
0,75% !) par la BCE
ont prétendu qu’il fallait maintenir le niveau de leurs liquidités pour
qu’elles financent des crédits et donc l’activité. Dès lors que les profits
bancaires et les activités spéculatives n’ont pas été inquiétés, le financement
de l’économie qui devrait constituer le métier des banques n’est en réalité que
la variable d’ajustement de leurs diverses opérations. D’ailleurs la direction
de la Banque
de France a engagé un vaste plan social réduisant ses moyens de soutien aux
surendettés et de suivi de l’activité économique tandis que celle de la Société Générale
veut faire passer un plan social permanent pour réduire ses effectifs. Avec
l’abandon des accords de Bâle III, il ne reste plus rien des résolutions
énergiques prises lors du krach des subprimes par les gouvernements des
principales puissances économiques du monde. Oubliées la promesse de tirer les
leçons de la crise de 1929 et de mener des politiques de relance par
l’investissement public pour contrer la spirale de la récession. Oubliée
également la réforme des rémunérations des traders et des bonus des dirigeants
qui incitent à des prises de risque inconsidérées. La politique menée n’a eu en
réalité qu’un but, rétablir les profits bancaires et financiers. C’est-à-dire
servir le capital financier au nom de l’adage selon lequel "quand la
banque va tout va". On voit ce qu’il en est : les cours des valeurs
bancaires augmentent au moment où la récession s’installe.
François Delapierre
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