Mercredi dernier, pour la 5ème année consécutive,
la Communauté
de communes Ardenne Rives de Meuse a invité les conseillers municipaux des 17
communes qui la composent afin de leur montrer la vidéo présentée au mois de
janvier aux conseillers communautaires à l’occasion de la cérémonie des vœux.
263 élus étaient donc conviés à prendre connaissance, dans le cadre agréable de
la salle du Richat à Fromelennes, des réalisations de la comcom la plus
convoitée des Ardennes, parmi lesquels une soixantaine avait répondu présent.
Environ un sur quatre donc, au rang desquels figurait à ma grande surprise un
autre conseiller municipal d’Aubrives, ce qui n’est certes pas extraordinaire
mais néanmoins plus que les années précédentes ! Comme d’habitude, la
soirée s’est déroulée en deux temps.
Le premier, qui a duré 45 minutes, a permis de visionner un
petit film réalisé à la façon d’un journal télévisé avec, en guise de
présentatrice, la directrice de Radio Fugi Odile de Barros. Après avoir montré
les réalisations les plus marquantes de l’intercommunalité en 2012, à savoir
les inaugurations de la chapelle Walcourt, de la station d’épuration écologique
de Charnois et de la fresque de Jean-Paul Surin à Vireux-Molhain, ainsi que l’élargissement
de la porte de garde du port de Givet, ce plaisant montage a donné la parole à
4 acteurs majeurs de la comcom. A tout seigneur tout honneur, le premier à
s’exprimer a été le directeur général des services, Claude Wallendorff, qui a
fait un rappel de l’évolution des finances depuis la création du district de
Chooz en 1988. De façon très intéressée, il a ainsi mis l’accent sur les
différents dispositifs qui ont réduit les ressources de la communauté de
communes (écrêtement avec la loi Chevènement en 1999, ticket modérateur de la
taxe professionnelle en 2009, transformation de cette taxe en 2010, création du
fonds de péréquation intercommunal en 2012) et il a conclu à l’attention
« des 40 voleurs qui croient avoir trouvé la caverne d’Ali Baba » en
affirmant qu’Ardenne Rives de Meuse n’était pas riche, mais seulement à l’aise
grâce à une gestion intelligente et souvent consensuelle puisque 95 % des
décisions sont prises à l’unanimité.
Puis vint le tour d’abord de Daniel Tournay, le
vice-président en charge des travaux, qui a listé les chantiers réalisés depuis
2008 : l’achèvement du PACoG, la construction de l’aire d’accueil des gens
du voyage et du bâtiment de l’office de tourisme communautaire, la
déconstruction de Cellatex et du « vin sans eau », la rénovation
d’une partie des parois du Fort Condé, l’extension du bâtiment pour Teruel et
la réalisation de quelques voiries communautaires dont il a bien précisé
qu’elles étaient réservées aux seules communes de plus de 2.000
habitants ; ensuite de René Choin, le vice-président en charge de l’action
économique, qui a rappelé les trois axes mis en place par la communauté de
communes : le développement endogène avec le soutien aux
petites entreprises et aux reprises, le développement exogène avec la
prospection d’entreprises extérieures et le soutien à l’économie sociale et
solidaire avec par exemple la prise en charge de la compétence petite
enfance ; enfin de Jean-Pol Devresse, le vice-président en charge du
tourisme, qui a insisté sur l’installation à l’OTC d’une table numérique et de
quelques expositions temporaires ainsi que sur les espoirs qu’il a dans la
promotion du massif ardennais par une association regroupant aussi bien des
Français que des Belges et des Luxembourgeois.
Commença alors le deuxième temps pour lequel, je l’avoue,
j’avais fait le déplacement, à savoir le discours du Président de la Communauté de communes
Bernard Dekens qui a duré 40 minutes. Alors que j’attendais des propos musclés
voire agressifs à la suite du changement en profondeur des limites de
l’intercommunalité décidé dans les conditions que tout le monde connaît au mois
de décembre dernier, j’ai eu la bonne surprise d’entendre un discours très
pédagogique au ton certes ferme mais sans aucun excès. Evoquant la réalité d’un
« territoire en souffrance », il a mis en avant un certain nombre
d’arguments pour expliquer son opposition au nouveau schéma du Préfet. Parmi
eux, celui qui a été le plus développé a été le CIF, c'est-à-dire le
coefficient d’intégration fiscal (pour faire simple, c’est le pourcentage que
représentent les dépenses intercommunales dans le total des dépenses des
dépenses communales et intercommunales) qui s’élève à 83 % alors qu’il n’est
que de 36 % pour la comcom de Meuse et Semoy, de 21 % pour celle des Plaines et
Forêts de l’ouest ardennais et bien sûr de 0 % pour Revin. Un détail technique sans
intérêt, diront certains qui auraient bien tort puisque la dotation globale de
fonctionnement versée par l’Etat sera calculée non pas sur la base du CIF le plus
élevé comme c’était encore le cas il y a encore un an, mais sur celle du CIF moyen
augmenté de 5 %. Ce qui veut dire que le surplus de recettes que recevra la
future intercommunalité Nord-Ardennes sera inférieur à 900.000 euros, alors que
le surplus de dépenses pour assurer dans l’ensemble du nouveau territoire les
mêmes services que ceux dont bénéficient aujourd’hui les 17 communes d’Ardenne Rives de Meuse sera bien supérieur.
Quant aux autres arguments qui ont été développés, outre le
contrat moral qui aurait été passé lors de la fermeture de la Chiers, il y a eu les
difficultés actuelles de KME qui vaudraient bien celle connues par Electrolux
et qui justifierait de conserver pour le territoire ses ressources actuelles,
le comportement du Préfet qui aurait outrepassé ses pouvoirs en modifiant
profondément le périmètre voté en 2011 et qui donnera lieu à un recours en
justice ou encore le déni de démocratie que constituerait le refus de prendre
en compte l’avis négatif que rendront au moins 70 % des communes concernées
représentant plus de 70 % de la population de la future intercommunalité. Sans
oublier bien sûr la disparition d’un certain nombre de services rendus à la
population comme le taxi à la carte, l’aide aux études supérieures et surtout la
gratuité de la collecte et du traitement des déchets ménagers et assimilés qui
devrait être remplacée par une taxe annuelle d’environ 60 euros par personne.
Fort de ces éléments, Bernard Dekens a alors conclu en affirmant qu’il ne
serait pas « le président qui proposera d’augmenter les impôts et de
baisser les services » et qu’il n’entendait pas « se laisser bouffer
sans rien faire ». Réussira-t-il dans son combat ? Il est encore trop
tôt pour le dire, mais une chose est sûre, sa détermination est pleine et entière...
Laurent Bouvier