"La cour des Comptes estime dans son rapport annuel publié
que les salariés d'EDF, groupe contrôlé par l'Etat, bénéficient d'avantages et
de salaires généreux, sans lien évident avec la performance de l'entreprise."Les salariés du groupe EDF, contrairement aux salariés
du secteur privé, n'ont pas subi de ralentissement du rythme de progression de
leur rémunération globale depuis 2008, en dépit des résultats contrastés
d'EDF", estiment les magistrats, rappelant les performances moyennes ou
mauvaises de nombreux paramètres financiers du groupe, comme le chiffre
d'affaires, l'endettement ou la valeur de l'action. Les dirigeants sont aussi critiqués, la Cour jugeant leurs
rémunérations "en forte augmentation jusque récemment". Elle pointe en outre les "nombreux avantages liés à
l'emploi" pour les salariés, comme des tarifs avantageux ou des
abonnements gratuits.
Les Sages formulent donc plusieurs recommandations,
notamment de rendre plus ambitieux les objectifs donnant droit à une
rémunération variable, ou encore de revenir sur certains avantages liés au
tarif préférentiel d'électricité pour les agents. Dans ses réponses, le groupe estime que "la plupart" des avantages dont bénéficient ses salariés "ne sont pas si
éloignés de ce qui se pratique ailleurs, dans d'autres entreprises
françaises", et que l'augmentation des rémunérations des dirigeants a été
nécessaire pour préserver les ressources humaines dans un contexte de
concurrence.
(dépêche AFP, février 2013)
Dans un territoire comme le nôtre qui compte, du fait de la
présence d’une centrale nucléaire, environ 750 agents EDF, cette dépêche
publiée par l’AFP quelques jours avant que ne soit officiellement présenté le
rapport annuel de la vénérable institution de la rue Cambon n’a pas pu passer
inaperçue. Pourquoi ? Parce qu’au-delà des hausses globales de salaire et
des rémunérations des principaux dirigeants, elle remet ouvertement en cause le
tarif très avantageux de l’électricité pour les quelque 300.000 agents actifs
et retraités d’EDF et GDF qui ne paient que 5 à 10 % du montant réel de leur
consommation. Un avantage mis en place peu après la guerre, en 1946, à une
époque où la main-d’œuvre se faisait excessivement rare et où il convenait donc
de la fidéliser par tous les moyens, sur lequel on n’est jamais revenu depuis.
Pour les syndicats, ce tarif préférentiel est un acquis
social destiné à compenser la faiblesse des salaires en début de carrière qui
flirteraient avec le SMIC. Il est donc intouchable ! Mais pour le Trésor
Public, il s’agit d’un véritable avantage en nature qui doit, depuis plusieurs
années, être intégré dans la déclaration des revenus. Surtout, pour le reste de
la population qui n’ignore pas que ce tarif préférentiel est valable à vie et
applicable quel que soit le niveau de consommation du foyer dans sa
résidence principale mais aussi dans son éventuelle résidence secondaire, ce
n’est rien d’autre qu’un privilège d’autant plus insupportable qu’en cette
période de crise économique son coût, estimé à 222 millions d’euros pour
l’année 2010, est répercuté sur les factures des autres consommateurs. Quant
aux écologistes, ils n’ont de cesse de faire remarquer que ce tarif est
contraire à l’esprit du Grenelle de l’environnement puisque la consommation
électrique est multipliée en moyenne par 3 dans les foyers qui en bénéficient.
Le tarif agent est donc sur la sellette, à tel point que les
pistes se multiplient pour en maintenir l’existence tout en le rendant
socialement plus acceptable ! Parmi elles, on peut relever celle du député
UMP des Bouches-du-Rhône Dominique Tian qui propose que le tarif agent soit
ramené à 50 % du tarif standard. Mais il y a aussi celles de la Cour des Comptes qui va dans
son rapport au-delà du simple constat et suggère notamment de rendre cet
avantage « plus juste et moins exorbitant » en le plafonnant à un
certain niveau au-dessus duquel un tarif normal ou un peu moins avantageux
serait appliqué. Une proposition qui fait sens au vu des discussions engagées
pour passer à une tarification progressive de l’électricité, par paliers de
consommation. Mais de là à dire qu’elle sera adoptée, il y a plus qu’un pas
qu’il serait extrêmement hasardeux de franchir, surtout dans le climat social
particulièrement dégradé que nous connaissons actuellement...
Laurent Bouvier
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